Votre temps d'attente est estime a ...

Votre temps d'attente est estimé à ... 12 jours !

Deux petites semaines d'attente pendant lesquelles nos demandes de visas feront l'aller-retour entre Biskek au Kirgizistan et Tashkent en Ouzbekistan et qui nous permettront d'avoir deux nouveaux autocollants dans nos passeports. Mais 12 jours à Teheran, c'est long ... Nous avions prévu de partir en bus pour le sud du pays dès les démarches lancées auprès des ambassades ... Mais c'était sans compter sur Arash, sa motivation à nous faire découvrir son pays, son énergie pour les activités sportives et sa bande de copains bien décidés à nous faire passer du bon temps.
La suite se déroule en deux variantes : pour suivre Lydie tapez 1. Pour suivre Eric tapez 2.

  • Vous avez tapé 1 :

Après 6h de route en direction de Bandar-e-Anzali, vous passez du bon temps au bord de la mer Caspienne, goûtez une fois de plus aux délicieux kebab de poulet accompagné encore une fois d'alcool fait maison et vous initiez à la cuisine traditionnelle iranienne grâce à Solmaz après de longues heures passe dans la mer.

  • Vous avez tapé 2 :

Après 6h de route aussi, vous arrivez à Hamedan, faites 7h de spéléo avec une baignade dans de l'eau à 7°C, reprenez le bus à 23h pour refaire 7h de trajet, mangez un peu de Kale Pache à Rasht (petit déjeuner à base de tête de veau : langue, yeux, et cervelle) et vous arrivez à7h ke matin à Bandar-e-Anzali pour profiter aussi de l'eau, à 32°C cette fois ...

Voilà, tout est dit ! Ou presque ;)

La suite, c'est en "vrais" touristes que nous la vivrons. On abandonne nos vélos chez Arash et après 6h de route depuis la mer pour retourner à Tehran, on enchaîne directement avec une nuit dans le bus pour se réveiller à Isfahan.

10 jours, 29h de bus

Site culturel inscrit à l'Unesco, cette ville mythique me faisait rêver depuis longtemps. Tant de monde y est passé, depuis Marco Polo jusqu'à nos jours, tous ces voyageurs anonymes suivant comme nous la Route de la Soie. En 1587, le Shah Abbas I fait de cette ville la capitale de son royaume et il mettra les moyens pour en faire une ville à part.
Isfahan, c'est d'abord Imam Square : une place immense entourée de bâtiments tous plus beaux les uns que les autres : palais, mosquées mais aussi un bazar qui en fait tout le tour et même au delà, où on peut voir les artisans fabriquer des beaux souvenirs à même la rue. La place n'a pas beaucoup changé depuis sa construction en 1602 (et terminée 25 ans plus tard). Son architecte, Ali Akbar Esfahani, pourrait être très fier aujourd'hui de voir qu'en plus d'attirer les touristes du monde entier, la place se remplit de familles Irannienne dès le couché du soleil. Une foule impressionnante prend possession de chaque coin d'herbe et s'installe pour un pic-nic digne de ce nom jusqu'à passé minuit. La température y est plus fraiche et le site tellement magique avec les fontaines et les lumières éclairant la Mosquée et le Palais de Ali Qapu qu'on se prend à y revenir chaque soir nous aussi pour y manger des glaces !

Mais Isfahan, c'est aussi des ponts magnifiques qui enjambent la rivière Zayandeh. On passe une bonne partie de l'après-midi à se promener d'un à l'autre. Si-O-Seh, Chubi et Khaju sont dans cet ordre de plus en plus beaux. Nous serons accompagné de Mohammed, étudiant en Français à l'université d'Isfahan. Nous serons d'ailleurs très étonnés du nombre de personnes parlant très bien français en particulier dans cette ville. Après l'anglais, parler une langue étrangère augmente vos chance d'avoir des clients en tant que guide touristique, mais surtout d'avoir un ticket et un visa pour l'Europe. Nous le découvrirons de façon assez flagrante lors de nos différentes conversations, tous, nous solliciteront pour les aider dans leurs démarches consulaires pour avoir un visa pour la France. On ne peut rien faire pour eux évidemment, mais cette envie de partir pour l'étranger est très forte chez beaucoup de jeunes Iraniens. Angleterre, USA, France, Allemagne, Australie ou Singapour, qu'importe, mais l'exil est recherché par beaucoup d'entre eux. La fuite des cerveaux, puisque seuls les plus instruits pourront avoir le précieux sésame pour la sortie du pays.

Isfahan sera aussi synonyme pour nous de moments de détente comme nous en avions encore jamais eu dans les grandes villes.  Ces passages express dans les capitales des pays traversés étaient souvent des grands moments de stress de déprime et de remise en question. Pas de ça ici, on profite de ne rien faire la journée, on fait la sieste à cause de la chaleur et on discute de nos expériences avec les nombreux voyageurs au long court qui sont dans la même auberge de jeunesse que nous. Japonais, Hollandais, Allemands et Anglais, tous sont routards et sur la route pour quelques semaines ou quelques années ... ça nous fait du bien de pouvoir discuter avec des touristes, comme nous, et pas seulement avec les gens du pays qui nous posent souvent les mêmes questions et qui fait qu'on ressasse toujours la même rengaine. Ça nous change un peu et ça fait du bien !

Nous voulons ensuite faire un tour dans les montagne de Zagros, alors on se pointe à la gare routière de Ispahan et on saute dans le dernier bus pour Shar-e-Kord. Pas de plan très précis pour le soir, seul un hôtel réputé miteux, mais on espère secrètement pouvoir se faire inviter chez une bonne âme ... Dès qu'on monte dans le bus, deux jeunes filles changent de places pour venir s'asseoir à côté de nous ... enfin, de moi ... parce que à côté d'Eric c'est interdit.

Leçon de Ta-arof

Elle me fait l'interrogatoire habituel (d'où je viens, si je suis mariée avec le monsieur à côté de moi, si j'ai des enfants, si j'aime l'Iran, les Iraniens, les Iraniennes, les bus, les chats ...) Bref, tout y passe jusqu'à la question fatidique de savoir où je dors ce soir. Je lui répond gentiment qu'on a repérer un hôtel pas cher en ville pour y passer la nuit et que demain de tout façon on va partir tôt pour Yasuj. Elle me dit donc qu'elle connait un hôtel pas cher juste à côté de chez elle et qu'elle veut bien nous aider à le trouver une fois arrivés. Sympa, on passe donc l'heure qui suit chacune de notre côté. Viendra le moment fatidique où elle me proposera de venir dormir chez elle. Peut-être par pitié parce qu'elle sait que le petit hôtel est un peu pourri, ou parce qu'elle a envie de discuter avec nous parce que le courant passe bien. C'est donc là qu'intervient notre examen de Ta-arof.

Qu'est-ce que c'est cette bête ? ça se mange ? Et bien non, pas du tout. Le ta-arof, c'est LA formule de politesse utilisée par les Iraniens et qui est très perturbante pour nous pauvres petits européens. On s'explique: lorsque l'on vous propose quelque chose, il vous faut toujours refuser par trois fois (minimum) avant de finalement accepter l'offre de votre interlocuteur. Voici quelques cas pratique pour vous permettre, à vous aussi, d'être complètement perdu:

- Vous êtes invité dans une famille et vous crevez littéralement la dalle. La mère vous propose de manger quelques chose. Vous vous devez de refuser. Elle insiste, bien sûr, elle voit sur votre visage que vous n'avez rien manger de la journée. Et de nouveau, vous devez refuser. "Non, merci, ça va... J'ai mangé un kebab énorme (il y a deux jours)" Troisième tentative, et enfin, vous pouvez accepter son offre. Bon, ensuite, dès que le poulet et le riz est devant votre nez, rien ne vous interdit de vous empiffrer comme un gros goinfre jusqu'à ne plus pouvoir respirer.

- Pareil lorsque vous être en train de manger goûlement un paquet de biscuits dans un bus de nuit. Vous sentez le regard de votre voisin de couloir qui vous envie. Mais votre paquet de gâteau, il est déjà presque fini, et il ne suffira largement pas à calmer grumit. Mais puisque vous connaissez la règle, vous lui tendez quand même votre paquet et vous savez très bien qu'il refusera la première fois. De cette manière, vous ne passez pas pour un gros goujat et vous pouvez finir votre paquet avec bonne conscience ...

Mais pour bien faire, le ta-arof marche aussi dans l'autre sens:

- Vous voulez prendre un taxi. Vous hélez le premier qui passe et vous négocier la course avant de monter dans le véhicule (jusque là, pas de problème, c'est partout pareil) Une fois arrivés à destination, vous sortez vos petits billets et vous les tendez au chauffeur. Là, il refuse l'argent ... Cooooool ! Il nous trouve sympa, il a compris qu'on avait pas beaucoup de tunes et après 15 minutes à discuter avec nous, il nous offre la course ! Et bien non, pas du tout, il fait du Ta-arof. Il attends bien évidemment qu'on lui paye ses 2 $ pour le quart d'heure du trajet. Alors on lui met les sous dans la main et c'est bon.

- Vous avez faim et vous vous pointez chez un petit marchant pour lui acheter votre casse-croûte favori. Une fois à la caisse, le gérant à la même réaction que le taxi lorsque vous lui tendez vos billets. "Non, ce n'est rien" Décidément, ils sont super sympa dans ce pays. On se sent bien accueilli et on se dit qu'à se rythme là, on va pas beaucoup dépenser en bouffe. Alors on sort, mais le petit marchant vous court après, puisque lui aussi faisait du Ta-arof et que donc, le sandwich, il fallait quand même le payer !

J'en revient donc au fameux examen lors de notre trajet en bus pour Shar-e-Kord. La jeune fille nous propose de venir dormir chez elle, mais je ne suis pas une débutante. Je refuse poliment en disant qu'elle ne doit pas s'inquiéter, et que des hôtels miteux, on en a déjà vu un paquet. Alors elle nous accompagne quand même à l'autre hôtel soit disant un peu mieux. Forcément, à 40$ la nuit, il ne peux pas être pire que l'autre ! ... C'est un "Tourist Inn", chaine d'hôtels gouvernementaux aux standard occidentaux, même le prix ... Et beaucoup d'iraniens pensent que c'est tout à fait indigne pour nous d'aller dormir ailleurs. Bref, comme c'est surtout très indigne pour notre porte feuille, on refuse poliment. Elle nous fait donc une deuxième proposition d'aller dormir chez elle. Deuxième refus, on ira à l'hôtel miteux, pas de problème. Là elle insiste, on ne sais pas si elle a pitié pour nous mais on ne voudrait pas non plus la vexer en refusant trop longtemps, alors ok ! On se retrouve donc dans une famille bien conservatrice, les femmes n'enlèvent pas le voile chez elle ici (peut être parce que Eric est là ?), on mange tout seuls dans le salon pendant que eux mangent dans la cuisine, mais ils nous feront quand même visiter leur région le lendemain et nous aideront à prendre notre bus pour Yasuj. Comme d'habitude, on ne sait pas trop comment les remercier, alors on prend une photo ensemble et on leur enverra ensuite comme carte postale.

On enchaine donc le bus vers Yasuj, où on doit retrouver Nader, un copain de Arash. Enfin copain ... ils ne se sont pas vu depuis 10 ans et Arash n'avait même plus son numéro de téléphone. Mais c'est pas un problème, ça se passe comme ça en Iran ! Il nous récupère même à la sortie du bus avec deux de ses copains et nous emmène directement au Festival de la Culture Nomade d'Iran : musique, danse et interview pour la TV locale :) On finira par dormir à la belle étoile chez les grand-parents. Le lendemain c'est promenade dans les montagnes et pique-nique à l'iranienne : poulet grillé, "dough" (sorte de yogurt liquide), et pastèque. C'était court mais intense :)

Le soir on saute vite dans un taxi collectif pour Shiraz, où Jahan, le frère de Arash nous attend. En deux jours, on visitera la forteresse et les mosquées, mais les attractions phares sont les tombes des poètes Hafez et Sadi. Rien de très impressionnant, mais c'est assez marrant de voir ces jeunes iraniens venir réciter des poèmes sur la tombe de leur idole.
Mais Shiraz c'est surtout très proche de Perspolis. Alors en allant vers Yazd, on s'arrête en route pour aller visiter ce site archéologique. Construite à partir de 518 BC par les rois locaux, cette cité n'avait d'autre utilité que d'en mettre plein la vue à ses voisins. Le site est immense et même si ce n'est pas très bien conservé, ça reste très impressionnant.

Par contre la suite de la route vers Yazd a été un peu plus compliquée que prévue. Les bus sont ne sont pas vraiment nombreux sur cette route alors on s'est qu'en stop ça devrait le faire. Mais les iraniens, le stop, ils connaissent pas trop. Avec des bus aussi bon marché (1$ par heure environ), tous veulent nous ramener à la gare routière de la ville d'avant et on devra attendre 30 min avant de trouver une bonne âme qui veut bien nous faire avancer et pas reculer ... Arrivés à la gare routière suivante, plus de bus direct pour Yazd, on attendra encore 1h un bus pour avancer et on devra finir en taxi collectif, après 7h de trajet ...

A Yazd, on se retrouve à nouveau dans le repère des routards d'Iran en compagnie de Néerlandais, d'Anglais, d'Allemands, ... Il fait chaud, il y a du wifi à l'hostel et de la bonne compagnie. Alors on passe beaucoup de temps sur la terrasse et on attend 17h pour aller faire un tour en ville. La vieille ville est superbe, toute en terre rouge mais ce n'est pas une ville musée comme certaines autres, des gens vivent vraiment dedans !

Mais ça y est, le temps d'attente est écoulé et il est temps de retourner à Tehran, encore en bus de nuit et le matin suivant, nos visas Kirgiz et Ouzbek sont dans nos passeports !

Reste à dire au revoir et encore merci à Arash et ses amis. Quelques bouteilles de vin rouge supplémentaires et encore quelques bonnes heures de discussions sur les manifestation de l'année dernière qui a valu a certains des arrestations arbitraires de plus de 2 mois ...

Après 21 jours sans pédaler, nos vélos nous manquent ... en selle ...