... rentre tes blancs moutons !
Bienvenue en Nouvelle-Zélande... Nous le savions, tous le monde nous avais prédit un temps maussade, un pays au fin fond du "trou-du-cul" du monde, plus de moutons que d'habitants et pourtant, c'est ce pays là qui nous faisait rêver ...
Auckland
Tout commence pourtant bien, on débarque sous le soleil et en attendant que la ville se réveille on gère comme on peut notre mal de terre. A peine débarqué sur le sol Kiwi, tout tangue autour de nous. Alors, tremblement de terre ou ville sur pilotis ? Ni l'un, ni l'autre, et le gérant du magasin à qui nous posons la question nous répond avec amusement : "Vous arrivez du port? Alors c'est normal, vous irez mieux d'ici quelques heures !"
C'est donc tout nauséeux et en devant s'asseoir à plusieurs reprises que nous arrivons finalement chez Helen et Richard qui vont nous héberger pour deux nuits. Le temps de faire un tour à l'excellent musée de la ville, de passer une magnifique après-midi en compagnie de la famille Villey, de se faire au décalage horaire, +2h par rapport à Sydney, (et +12h par rapport à l'Europe), de faire connaissance avec le supermarché et le revendeur internet (on est pas geek pour rien) de passer 2 nuits supplémentaires dans la caravane d'une auberge de jeunesse, et c'est parti pour notre virée dans l'île du Nord.
Et comme ici la vie est plutôt bien faite, c'est grâce aux cartes spéciales "pistes cyclables" que nous quittons la Ville des Voiles. Mais bien vite, on devient inquiets. Après les banlieues et les files de voitures pressées en cette veille de Noël, la route laisse place à la campagne et aux champs. Mais quels champs ! Peu de cultures, mais des vaches, des vaches et quand même quelques moutons ! Et qui dit vaches, dit barrières. Ce sera notre lot quotidien pour les jours (ou les semaines) à venir. Des barrières, des barrières et... des barrières ! On se sent en prison, avec des paysages certes magnifiques, les collines et la mer à chaque virages, mais on est constamment inquiet de quand arrivera l'heure de se trouver un endroit où dormir. Impossible de s'arrêter au bord de la route puisque tout est clôturé ou derrière des murs. Les seuls espaces vert on été convertis en "parc nationaux" et où le camping est interdit surtout pour nous qui n'avons pas de WC "portables" au contraire des camping-car. Nous sommes découragés surtout qu'il y a très peu d'habitations en vue et qu'il nous faudrait passer le portail fermé avec un double cadenas pour aller oser demander l'hospitalité au propriétaire du coin. Et ce soir, c'est Noël. Les gens doivent être bien occupés à fêter en famille, même si pour nous c'est difficile à réaliser. Pas de neige et peu d'animation, ce jour du 24 décembre sera pour nous un jour comme les autres. Et après plusieurs kilomètres infructueux, nous finissons seul camping officiel du coin (44.- NZ$ pour poser notre tente!) et passerons la soirée tranquillement avec au menu, spaghettis et au lit vers 21h.
Chez les Hobbits
Heureusement pour nous, notre carte achetée en Australie est vraiment bien détaillée et nous pouvons ainsi facilement éviter les grosses routes. On fait quelques détours, on demande notre chemin parfois, mais en général on avance bien, contents de pouvoir découvrir ce pays, de plus en plus sereinement. En plus des indications courantes d'une carte routière normale, notre carte indique aussi les campings (gratuits ou pas) les points d'intérêts touristique et aussi, les sites sur lesquelles ont été tournés des scènes de la trilogie du "Seigneur des anneaux". Nous ne sommes pas de grands fans de ce film, mais cela nous amuse de nous souvenir des moments clef du film en voyant les paysages défiler devant nous. Nous arrivons à Matamata, où a été construit le village des hobbits. Une fois n'est pas coutume, on se contentera de prendre en photo les jolies collines aux alentours, "l'attraction" phare du coin coûtant 68 NZ$ par personne. Un peu cher pour aller voir les restes d'un décor, surtout que paraît-il, Monsieur Peter Jackson a détruit la plupart des maisons pour des raisons de droit d'auteur.
On continue notre route en passant par Te Aroha et son geyser (gratuit!) et on prend même le temps d'aller se balader une petite heure pour aller voir une jolie cascade (gratuite elle aussi, on ne se refait pas !)
Hospitalité Kiwi et rugby
La raison pour laquelle nous aimons les petites routes de campagne, c'est d'abord parce qu'il y a moins de circulation, mais aussi parce qu'on espère avoir plus de chance de trouver un coin d'herbe non grillagé pour y planter notre tente. Seulement ce soir, la route non goudronnée en question est en fait un chemin pédestre et il nous est impossible d'y accéder avec nos vélos. Notre coup de bol du jour sera de faire la rencontre de Rick, qui revient justement de son tour en vélo et à qui nous demandons conseil pour rejoindre Rotorua. Il est déjà 17h, et c'est très naturellement qu'il nous offre son terrain à deux pas de là pour y dormir. Vous devinerez peut-être la suite, une fois arrivés sur son pas de porte, il nous sera impossible d'imaginer planter la tente, et c'est une une soirée très agréable qui nous attend. On dormira dedans alors qu'il commence à pleuvoir, et on partagera un BBQ digne de ce nom en compagnie de notre hôte et de son amie, Lynice. La simplicité de ces gens et leur accueil sans prise de tête resteront pour nous un merveilleux souvenir. Ils nous parlent de leur ferme, du prix du lait qui augmente (2.65 NZ$ le litre!) de la traite de leurs 250 vaches (une ferme minuscule pour la région) et de leur quotidien en toute simplicité. Le contact passe bien entre nous, surtout lorsque Eric se verra obligé de revêtir un maillot des All Blacks alors que le match France - Nouvelle-Zélande est retransmis à la TV. Le rendez-vous est pris pour dans 4 ans, à Londres, et on promet à Rick de lui offrir un t-shirt de l'équipe de France si il vient en Europe pour assister à la coupe du monde de rugby.
Mauri et mares de boue
Le lendemain on reprend la piste qui nous mènera à Rotorua en passant par Mamaku. Nous ne sommes pas au Sénégal, mais ici la plupart des noms de villes et villages portent des noms d'origine Mauri. Détail surpenant aussi par rapport à l'Australie, tout les panneaux d'information sont écrit en deux langues: anglais et mauri. On ressent une forme de respect mutuel et une certaine facilité de cohabitation qui n'existe pas du tout du côté Aussie (beaucoup des blancs australiens rencontrés en Australie étaient racistes, et nous le faisait savoir.)
En arrivant à Rotorua, on "sent" la ville bien avant de la voir. Ici, parcs géothermiques, geysers et mares de boue cohabitent et une odeur de souffre envahit la ville suivant la direction du vent.
On se promène dans le parc de la ville en compagnie d'une multitude de touristes et on se paiera même le luxe d'assister à une représentation de "Haka" dans un village "typique" mauri. Impossible de manquer la fameuse danse de guerre sur le sol de Nouvelle-Zélande même si le décor sonne un peu faux et si le village voit défiler plus de 500 voyeurs par jour. Mais la visite en vaux la peine, on découvre une partie de cette culture millénaire faite de tatouages, de gravure et de cuisine à la vapeur fournie gratuitement par les sources locales.
Tongariro Crossing
Mais la pluie est de nouveau de retour. Et quand il pleut ici, ça dure, c'est avec le vent de face et ça met le moral à zéro. Nos sacoches étanchent prennent l'eau, nos veste gore-tex après presque 2 ans de voyage de sont plus gore-tex du tout et puisque l'ambiance est humide, rien ne sèche et on traîne derrière nous comme une odeur de moisi. On se demande bien ce qui nous a motivé à venir ici.
Tout ça pour ça !
Des conducteurs de voiture irrespectueux qui semblent trouver marrant de nous frôler alors qu'il nous est déjà pénbile de rouler droit à cause du vent et la vue sur les montagnes est bouchée à cause du gris des nuages. En arrivant à Turangi, nous sommes bien décidés à passer quelques nuits au sec, et puisque l'auberge de jeunesse du coin coûte aussi cher qu'un emplacement de camping on décide de rester pour le Nouvel An. L'ambiance n'est pas hystérique et franchement c'est tant mieux. On essaie de faire sécher nos affaires, on cuisine des plats au four (le luxe suprême) et on retrouve par hasard le couple de québécois croisé en Australie. Eve-Lyne et Alex sont aussi sur la route pour l'île du sud, et c'est tout naturellement que nous repartiront ensemble le 1er jour de l'an, sous le déluge.
On file ensemble en direction de chez Kevin, qui habite dans une ferme à environ 30 km de Turangi. Kevin est un ami du propriétaire de l'auberge de jeunesse et il nous a été proposé de rester dormir chez lui pour quelques jours en échange d'un coup de main dans sa propriété. Un bon plan pour nous et une expérience qui s'annonce différente, mais surtout, Kevin habite à deux pas de l'arrivée du Tongariro Crossing. Cette marche est "LA" randonnée à faire dans la région. Passant au milieu de volcans plus ou moins actifs, de lacs d'émeraude et de paysage lunaire. Coup de chance pour nous donc, puisque que Kevin nous amènera au départ de la marche et après quelques 20km à pied nous nous retrouverons directement "à la maison". Autre avantage non négligeable, nos vélos et nos sacoches resteront en sécurité chez lui, bien plus rassurant que de tout devoir laisser sur un parking pendant toute une journée sans surveillance.
Magnifique journée avec nos amis québécois, même si nous ne sommes plus du tout habitués à ce genre de discipline. Marcher ou faire du vélo, c'est pas du tout pareil, et nos muscles nous le feront bien sentir le lendemain matin ! Un peu vite proclamée "Plus belle randonnée du monde" par notre guide Lonely Planet, cette belle promenade aura eu l'avantage de nous faire vivre une journée différente et c'est vrai que les vues depuis le sommet sont splendides !
On passera les deux journées suivantes à bricoler autour de la maison de Kevin, les garçons ayant pour mission de nettoyer un mini-bus que Kevin à vendu à de jeunes touristes et les filles à conduire le tracteur pour déplacer quelques véhicules ou autre tas de cailloux.
Kevin aura été pour nous plus que "le bon plan du jour", il aura aussi été un merveilleux cuisiner et un hôte ouvert et attentif, parlant mauri et proche de ce peuple qui prône le respect des autres et de notre mère la terre. Si seulement sa fille de 7 ans ne parlait pas autant, on serait sûrement restés encore quelques semaines ! ;)
Tabarnak, c'est un convoi exceptionnel !
On continue la route à 4 et une fois de plus ça nous fait du bien de partager notre aventure, nos soucis et nos problèmes mécaniques avec des cyclos qui vivent la même "galère" que nous. Le petit plus qui rajoute du piment, c'est que pour une fois, ce n'est pas la France qui se moque gentillement de mon accent Suisse, mais nous qui faisons des cours de québécois. Et bien oui, voyager avec Eve-Lyne et Alex, c'est comme des capsules d'humour! On ne fait plus la cuisine dans notre "popotte", mais dans un "chaudron" et on change nos tournures de phrases lorsqu'on veut poser une question.
Ce n'est plus: Tu sors?
Mais: Tu sors tu ?
On rigole beaucoup à propos de la fameuse "Loi 101" qui limite les anglicismes au Québéc. On dit: Arrêt pour Stop, cinéma maison pour home-cinéma, coussin gonflable pour airbag et PFK pour KFC.
Et puis un jour en fin d'après-midi, on s'arrête dans la petite ville de Ohakune pour faire des courses avant de se lancer sur une piste qui longe la rivière Whanganui et on tombe sur un autre couple de cylcos, franco-autrichien cette fois. Vincent et Sabine sont en Nouvelle-Zélande depuis quelques semaines déjà et ils ont l'intention de faire la même route que nous jusqu'à Wellington. On discute un moment devant le magasin, puis on décide d'aller camper tous ensemble dans un DOC (camping précaire gérer par le département de conservation de Nouvelle-Zélande: des WC et la rivière en guise de douche mais au moins ce n'est ni illégal ni hors de prix: 4 NZ$ par personne, le prix de l'apéro!) On passe une belle soirée à refaire le monde et on roulera ensemble pour les 5 jours qui suivent.
Pas toujours facile de respecter les rythmes de chacun, de satisfaire tout le monde ou de rouler à 6 dans une circulation parfois irrespectueuse, mais le bonheur de ne pas se sentir seul au monde est réel ! Sous la pluie ou avec le vent de face, on avance petit à petit en direction de la capitale. Par deux fois, on va sonner à la porte de fermiers pour avoir l'autorisation de planter nos tentes sur leurs terrains, et par deux fois on se faire accueillir à bras ouvert. Imaginez débarquer chez vous 6 cyclistes trempés de la tête au pied, pas douchés de la veille quand vous ouvrez la porte et essayez d'imaginer la réaction de ces gens qui au lieu de envoyer au camping ou à l'hôtel nous ont offert un thé ou un endroit à l'abri pour passer la nuit. Après tous ces mois sur la route, nous avons déjà été accueilli par des gens ayant très peu de moyens, de culture et de couleur à chaque fois très différentes de la notre et à chaque fois nous étions hallucinés par la générosités de nos hôtes sachant nous recevoir sans appriori et en toute simplicité. On se rend compte qu'on ne s'habitue jamais vraiment à être gâter de la sorte, belle leçon d'humilité qu'on espère retenir à notre retour en Europe.
Wellington
10 janvier 2012, nous arrivons enfin à Wellington. Plus de 3 semaines après avoir quitté Auckland, nous arrivons à la pointe sud de l'île du nord, avec pour impression de n'avoir vu qu'une infime partie de ce pays. Nous débarquons chez Megan, qui nous héberge jusqu'à la fin de la semaine avant notre départ en ferry pour Piction, sur l'île du sud. Nous avions rapidement croisé Megan... à Istanbul, en mai 2010 ! C'était la première "kiwi" que nous rencontrions le long de notre route et elle nous avait dit presque en plaisantant qu'il fallait qu'on l'appelle lorsqu'on arriverait en Nouvelle-Zélande! Cela nous paraissait tellement loin, à l'une et à l'autre, que l'invitation à venir dormir chez elle n'avait pas vraiment été prise au sérieux. Et puis finalement nous y sommes arrivés. Alors je lui ai écrit un petit mot et malgré tout ce temps, elle se souvenait aussi de nous et nous attendait chez elle de pied ferme.
Nous sommes donc bien installé dans sa magnifique maison qui surplombe la baie de Wellington. Une vue à couper le souffle sur la mer et la ville qui s'étire en dessous de nous et surtout une agréable compagnie pour découvrir la ville.
Bon, il faut aussi dire que Eric passe la plupart de ses journée à réparer les vélos, ces derniers ayant bien soufferts des quelques 28'000 derniers kilomètres. Il faut racheter des pièces de rechanges (qui coûte en moyenne 2x plus chères qu'en France!) et ne pas compter les heures de travail pour démonter, graisser et rassembler les vélos ... Un temps fou à se salir les mains, mais nécessaire si nous voulons continuer notre voyage jusqu'à Invercargill, à quelques 1500 km d'ici, direction plein sud !
Demain on embarque sur le ferry qui nous mènera jusqu'à Picton. 3h30 en mer et puis à nouveau, la route qui s'annonce montagneuse, pluvieuse, venteuse mais aussi paraît-il, somptueuse ! ;)